Ce n’est pas très sexy comme histoire dans l’épopée entrepreneuriale du moment mais elle a l’avantage d’être réaliste, sinon franche.
Entre Nous Tv est l’une des premières web tv guinéennes, ce projet est né un soir de 2015, sur le lit d’une étudiante encore en licence… Je bloguais depuis deux ans environ et j’avais rencontré quelques entrepreneurs dont j’avais dressé le portrait sur devousamoi. Ceux-ci étaient toujours intéressants et tout ce qu’ils avaient à dire, m’emmenait à rédiger des papiers qui faisaient entre 2000 et 3000 signes… C’était long, très long et je savais que beaucoup finissaient par décrocher ou alors, à lire en diagonale. Entêtée, je voulais absolument retenir l’attention des lecteurs, qu’ils se saisissent de l’essence de ces jeunes à succès de bout en bout.
Je me suis alors dit, pourquoi ne pas convertir ces articles en vidéo ? La vidéo, c’était l’avenir, c’était plus simple, plus agréable et c’était le format le plus engageant. Ce qui est toujours le cas d’ailleurs aujourd’hui. C’est comme ça que la Web tv a vu le jour. J’ai bondi de mon lit, acheté un nom de domaine, planché sur quelques sujets vidéos, contacter des connaissances en renfort, élaborer une rapide stratégie de com offensive autour du projet, le bébé était né et les médias en parlaient.
Aujourd’hui, si cela était à refaire, je l’aurais biensûr fait différemment. Le projet se nourrissait de ma fougue, de mon obstination mais n’était pas préparé. Aucun business model, aucune stratégie de monétisation et surtout pas de vue à long terme. Je me disais qu’on verrait bien où ça mènerait. Je suis une entrepreneure sociale et parler d’argent m’horripile. Mais l’argent, que ce soit du social ou non, est incontournable comme le disait Mylène récemment. Les premières vidéo ont été très regardées et très partagées à ma grande surprise, surtout dans la diaspora qui était notre cible. Très vite, il a fallu tenir un rythme malgré les emplois du temps personnels d’une équipe bénévole. Il fallait par dessus tout s’adapter à la qualité des vidéastes professionnels. Autant vous dire que nous n’avons pas tenu. Pourquoi ? Tout simplement parce que la vidéo coûte très cher et que réaliser des capsules vidéos à moins de les monter soit même a un coût. Ce n’était plus un billet de blog, où la seule chose dont j’avais besoin était un clavier et cela je m’en rendais bien compte au fil de l’eau, du fait de mon impréparation.
Nous avons tant bien que mal résister avant que je ne décide tout simplement de stopper la production de vidéos jusqu’à ce que nous puissions en produire d’excellente qualité. Je suis très exigeante avec moi même je le sais, certains auraient très bien pu se contenter de MovieMaker sur Windows. Encore une fois, ce n’était pas le contenu le problème, nous avions la créativité et nous savions aller vers les sujets qui intéressaient. Mon obsession c’était la forme, la façon dont les séquences s’emboîtaient, la musique, le dynamisme, le peps, la magie des enchaînements, de l’image tout court. De plus, lorsque des gens travaillent bénévolement sur un projet qui vous tient tous à cœur, on ne peut pas leur demander de faire plus qu’ils n’en peuvent sinon on les rémunère. Fair enough. Ceux qui m’ont accompagné tout le long, même brièvement ont été extra et je les remercie infiniment, je ne les nommerai pas tous. Parfois, des interviews s’organisaient en moins de 24h, car un invité que nous voulions avoir depuis longtemps était de passage à Paris et qu’il fallait le capter. Souvent, l’équipe à Conakry payait son propre transport pour faire des reportages pour notre bébé, etc.
Tout ça pour dire que la passion, c’est génial, c’est un carburant inestimable, mais ficeler son projet est incontournable. Entre Nous TV n’est pas morte bien au contraire. Je repense sa stratégie en privilégiant la qualité à la quantité. Nous allons réduire le nombre de capsules à deux par mois; et tenter de trouver de supers monteurs qui vont nous aider à en faire des œuvres réussies. Je me tâte par ailleurs à lancer un crowdfunding pour financer cela, à moins qu’il y en ait qui veulent nous rejoindre et le faire bénévolement, le temps que les vidéos puissent s’auto-financer d’elles-mêmes (non non je ne perds pas espoir de le voir un jour